#blog-littéraire #chronique-littéraire #occasions-tardives #littérature-anglaise #Tessa-Hadley #editions-10-18
#Occasionstardives #NetGalleyFrance
Christine reçoit un coup de fil de sa meilleure amie Lydia, qui est dans tous ses états. Zachary, son mari, vient de mourir, victime d’une crise cardiaque. Christine et Alex accueillent chez eux Lydia pour l’aider à faire son deuil jusqu’au jour où elle décide de rentrer chez elle. Les choses prennent un tour différent entre Alex, Christine et Lydia, les vieux sentiment se réveillent en l’absence de Zach. Christine se retrouve alors confronté à sa propre solitude puisque ses liens avec son époux et son amie se distendent.
Tessa Hadley
303 p.
Editions 10/18
Late in the day, 2019
Ma Note

Retour en Angleterre avec un roman tout en délicatesse et finesse, en langueur, en sentiments. en questionnements, Occasions tardives est un doux récit sur un quatuor, l’histoire de deux couples, qui évoluent ensemble et en parallèle toute leur vie durant, dont l’harmonie est soudainement brisée par la mort soudaine de l’un d’entre eux. Roman de l’intimiste, ou quand un apparent et fragile équilibre se brise, les liens restants se dissolvent et se renouent différemment. J’aime les ouvrages ou les auteurs piochent dans le quotidien, dans l’ordinaire, des vies, des personnes et qui savent les explorer, les analyser subtilement et les sublimer par leur écriture. C’est le talent de Tessa Hadley, qui ne se départ pas de son habitude de décrire les femmes et les relations familiales en général.

Deux couples amis, quatre intimes. Alex et Christine face à Zachary et Lydia. Zach meurt, le monde de ces trois qui lui survivent tombe en lambeaux. Il y a évidemment la stupeur, le temps du choc. Puis vient le temps l’introversion, l’introspection celui des souvenirs, des regrets, des occasions ratées, puis vient le temps des occasions tardives. Chacun gère à sa façon, le couple encore vivant prend en charge et gère la veuve, qui a depuis son mariage totalement désappris à vivre seule. L’intimité à quatre est une chose, l’entente à trois est instable, l’équilibre est compliqué à atteindre et à garder, la place du quatrième est désormais vacante. D’autant que Christine et Lydia, les deux femmes, sont de caractère opposé et que l’exubérance et l’égo de la seconde finit par l’emporter sur la discrétion de la première. Un homme pour deux femmes, la sienne, celle de son ami, qui le temps de leur jeunesse a été passionnément éprise de lui, Alex. Le triangle amoureux se dessine.
Les quatre amis ont été si proches les uns des autres, que cette proximité se ressent jusqu’ liens qui unissent les filles de chacun des couples, dévouées l’une à l’autre. Et si Grâce a perdu son père, c’est Alex qui prend le relais de la figure paternelle, et si le mari a disparu, Alex prend peu à peu sa place en tant qu’époux. Drôle de roman sur l’intimité fusionnelle qui tourne à une étrange confusion des rôles. Si Lydia sait s’oublier derrière son époux, et c’est finalement ce qui plait à Alex en elle, Christine, l’artiste peintre, a su trouver plus tôt dans la compagnie de Zachary, propriétaire d’une galerie, une oreille bienveillante, et plus que tout, complémentaire. C’est une sorte de chassé-croisé, plus que de vaudeville en réalité, qui ouvre la voie à l’émancipation de l’une car ce récit n’a rien de vulgaire, même lorsque le mari adultère faute chez l’amie de sa femme.
Au-delà d’une simple histoire d’adultère, c’est un rééquilibrage des forces, qu’esquisse là, tout en maitrise, l’auteure anglaise, ou Lydia retrouve une vie de couple tandis que Christine commence véritablement la sienne. Sous de faux airs de tranquillité, d’une apparente placidité, qui relève de ce flegme anglais, se dévoile un récit à clefs qui contient de plus profonds enjeux qu’il n’en laisse paraître au prime abord et l’intériorité d’une Christine qui fourmille de questions. Il y a beaucoup d’Henry James chez Tessa Hadley. Dans le souffle de ses personnages, celui de son phrasé, de son style, on se laisse emporté par cette apparente impassibilité qui contient en réalité une vie intérieure riche, qui ne demande qu’à s’exprimer. A travers le retour à cette jeunesse ou les deux femmes se sont liées d’amitié, et à travers l’histoire d’amitié de ces deux couples, qui révèle des épisodes pour le moins inattendus, c’est une Christine plus complexe et profonde qu’il n’y paraît au prime abord. Si elle paraît peut-être un peu mièvre, sa personnalité prend du relief, la couche de vernis s’effrite et laisse entrevoir une femme passionnée, alors trop bridée par un mari un peu trop conservateur et narcissique.
Avec le recul, ce livre se laisse redécouvrir avec plaisir, grâce à cette réflexion sur ce jeu de couples, qui était à un moment donné reparti de façon différente. Réfléchir au fait de savoir jusqu’à quel point l’amour est suffisant pour établir un couple fonctionnel pendant des décennies. C’est un ballet que Tessa nous présente là à travers les différentes étapes des deux couples qui se côtoient, se mélangent, se séparent, des amants qui se frôlent, se tournent autour, s’agrippent l’un à l’autre dans des étreintes avides. Tout finit par prendre sens, à la fin d’un ultime cheminement, qui est celui de Christine, Lydia et Alex s’étant complétés, le même que nous accomplissons avec elle.
C’est un roman que j’ai finalement apprécié à sa juste valeur, de façon mesurée et tempérée, ce n’est pas le genre de roman, à mon sens, pour lequel on s’enthousiasme de façon irrationnelle Il demande un peu de patience, un peu de persévérance, les états d’âme des uns, des autres, ont la fâcheuse tendance de traîner en longueur, à s’éterniser en moult détails moins pertinents, mais qui, après tout, font partie de ce jeu de lenteur, de constance, mais aussi d’indolence apparente qu’est celui de l’écriture, et du récit, de Tessa Hadley.
Quand le téléphone a sonné, ils écoutaient de la musique. C’était un soir d’été, il était 21 heures. Ils avaient fini de dîner et Christine, asisse, les pieds coincés sous elle sur le fauteuil, écoutait avec intensité ; elle reconnaissait la musique sans pouvoir dire ce que c’était. Alex l’avait choisie sans la consulter et, maintenant, elle s’entêtait à ne pas lui demander – il éprouvait trop de plaisir à connaître ce qu’elle ne connaissait pas. Il était allongé sur la banquette de la fenêtre en saillie, un livre ouvert dans la main, il ne lisait pas, le livre reposait sur son torse ; il contemplait le ciel au dehors. Leur appartement se trouvait au premier étage, et la fenêtre du salon donnait sur une large rue bordée de platanes. Une volée de perruches provenant du parc traversa le ciel de la fenêtre, et l’obscurité brun-pourpre du hêtre voisin fumait sur fond de ciel turquoise, avalant la dernière lueur du jour. Un oiseau noir, dont la silhouette, bec ouvert, se dessinait sur une branche, paraissait chanter, mais la musique couvrait ses trilles.
C’était le téléphone fixe qui sonnait. Christine s’arracha à la musique ; elle se leva en regardant tout autour d’elle pour déterminer ou ils avaient laissé le combiné, la dernière fois qu’ils s’en étaient servis – probablement quelque part dans la pièce, parmi les piles de livres et de papiers. Peut-être dans la cuisine avec la vaisselle? Alex ignora la sonnerie, ou montra uniquement qu’il l’avait entendue d’une petite tension agacée du visage – toujours cette expressivité fluide, étrangère, parce que ses yeux étaient si sombres, soulignés comme s’ils étaient peints. Avec l’âge, cela devenait de plus en plus frappant, et un éclat filtrait de sa chevelure qui, autrefois, avait été de la couleur de l’or sombre terni.
Pour aller plus loin

Trois soeurs et un frère se retrouvent dans la maison de leurs grands-parents, à Kington, en Angleterre, pour quelques longues semaines d’été. L’endroit est plein des souvenirs de leur enfance et de leur passé mais ils envisagent de le vendre. Sous une surface idyllique, les tensions se font peu à peu sentir : les invités sont perçus comme des intrus, les enfants découvrent un secret effrayant les emportant dans un jeu dangereux, la passion surgit là où on ne l’attendait pas, perturbant l’équilibre familial. Un certain mode de vie – bourgeois, cultivé, ritualisé, anglican – touche à son inévitable fin.

Clare retrouve par hasard un homme avec lequel elle a eu une brève aventure, l’espace d’une nuit, pendant son adolescence. Pour compliquer les choses, c’est le compagnon de sa meilleure amie, Helly. La rencontre n’aurait pu qu’être amusante ou gênante, mais elle chamboule la vie de Clare. Helly et Clare ont appris à fumer ensemble, ont lu des livres interdits serrées l’une contre l’autre dans le même lit. Si Clare est à présent mariée, mère de famille et femme au foyer, Helly est en revanche une actrice dont on peut admirer les courbes voluptueuses sur des affiches en ville. Et les deux femmes de s’envier mutuellement, au point de convoiter ce que l’autre possède. A travers l’histoire de Clare se tisse celle des membres de sa famille : Tamsin, sa sour, pique de l’argent à son grand-père pour s’offrir des vêtements haute couture ; Toby, son demi-frère, est un rêveur qui préfère voir la vie à travers l’objectif de sa caméra ; et Naomi, sa belle-mère, s’égare dans des relations amoureuses qui ne font que creuser son mal-être. Incidents domestiques est un livre subtil, où l’auteur brosse avec humour et tendresse le portrait d’une famille recomposée, qui reflète admirablement notre époque
Votre commentaire