Le cinquième cœur

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Mars 1893 à Paris. L’homme de lettres américain Henry James fait la rencontre de Sherlock Holmes au bord du Pont-Neuf, dont il avait fait connaissance quatre ans plus tôt. Le détective décide d’embarquer pour les Etats-Unis avec l’écrivain américain afin qu’il l’aide à trouver l’auteur d’un crime impuni depuis sept ans puisque James était un intime de la défunte: Clover Adams s’est en effet donné la mort mais son frère, Edward Adams, persuadé qu’il s’agissait d’un meurtre maquillé en suicide, a demandé au détective d’éclaircir le mystère de sa mort. Son retour aux Etats-Unis sera plus mouvementé que prévu puisque Sherlock Holmes va l’entraîner sur les traces d’un adversaire bien déterminé et un peu particulier.

Dan Simmons

620 p.

Editions Robert Laffont

The Fifth Heart, 2015

Ma Note

Note : 3 sur 5.

Après Christian Hans Andersen, voilà un autre homme de lettres en prise à une mort tragique et mystérieuse, l’américain Henry James. La résolution d’enquête ne faisant pas partie de son champs d’action, encore moins d’intérêt, autant dans le domaine littéraire que dans la vie quotidienne, Henry James est ainsi accompagné d’un détective, et pas des moindres. Le très britannique Sherlock Holmes: Dan Simmons a choisi deux mythes aux antipodes l’un de l’autre, l’un de la littérature classique nord-américaine, l’autre de la littérature policière anglaise, et surtout, totalement fictif. C’est l’improbable rencontre de deux personnalités différentes, l’un artiste, l’autre scientifique, un Henry James qui fait office d’un Watson amélioré. J’ai lu quelques romans de Conan Doyle il y a très trop longtemps et donc mes souvenirs se sont émoussés avec le temps. Ma seule référence en matière de Sherlock Holmes présentement est la série incroyable de la BBC, qui nous présente un duo extraordinaire, un Moriarty qui l’est tout autant, modelé sur un XXIe impitoyable. Et je n’ai donc pas eu l’occasion non plus de me plonger dans l’œuvre d’Henry James. J’ai commencé ma lecture avec, ainsi, peu d’idées préconçues.

Depuis Londres jusqu’à Washington, entre bateaux de croisière et trains, c’est une enquête policière, mouvementée, qui va ramener l’homme de lettres à bout de souffle, esquinté par les succès trop modestes de ses œuvres. Un épais roman aux goûts anglais et américain, qui nous entraîne au sein de la haute bourgeoisie, pénétrée par l’âme mélancolique, accablée, d’un Joyce qui atteint péniblement la cinquantaine, et l’esprit vif, en constante surchauffe et inquisiteur d’un curieux détective, qui pourtant n’a de vie que celle que lui donne Conan Doyle.

Un dynamique exaltant. James comprenait maintenant pourquoi ces moments étaient la raison de vivre de Sherlock Holmes, et pourquoi le détective recourait à l’usage de la cocaïne, de la morphine et de l’héroïne pour supporter les journées mornes et vides qui le détruisaient entre deux affaires, deux dangers.

Qu’il ait bien vu Moriarty à la descente du trolley une demi-heure plus tôt ou non, James ne s’en préoccupait guère à cet instant. Il n’y pensait même plus.

Dan Simmons a composé là un couple assez mal assorti ou le détective ne cesse de d’agacer son compagnon de voyage, de mettre sa patience à l’épreuve, le faire sortir de sa zone de confort, et de ses bornes. On ne peut pas dire que la cohabitation, tant qu’elle se fait, est harmonieuse: les manières du détective anglais qui bouleversent les petites habitudes de ses semblables, ne collent pas au caractère introverti et quelque peu rigide de l’écrivain. J’ai apprécié ce Sherlock Holmes somme toute assez mesuré qui finalement semble bien respecter l’original: brillant, malin, peu au fait des convenances et des relations sociales, un côté misanthrope, solitaire, avec juste ce fond d’humanité nécessaire pour ne devenir un personnage antipathique. Dan Simmons ne se contente pas seulement d’insérer le personnage mais il reste fidèle à ce qui représente son univers, Mycroft Holmes, Moriarty, Mme Hudson, Irene Adler, même si la plupart n’y font qu’un très vague passage. En revanche, l’intrigue est très judicieusement agencée par l’histoire ce duo, au caractère fictif, dont se joue allégrement Dan Simmons de manière répétitive. Intégrer simultanément un personnage d’envergure historique au niveau littéraire et un personnage totalement inventé, voilà le véritable point fort de ce roman. James dont l’œuvre est totalement ancrée dans le réalisme littéraire se retrouve face à une figure qu’il n’imaginait que romanesque. Comment replacer alors Arthur Conan Doyle dans ce monde ou son personnage prend vie, est-il un imposteur, un mythomane, le doute est définitivement installé.

Holmes esquissa un sourire crispé.

« J’ai découvert, dit-il en se penchant plus près, que je n’étais pas une personne réelle. Je suis… comment un homme de lettres comme vous l’exprimerait-il, monsieur James? Je suis, j’en ai acquis la preuve irréfutable, une construction littéraire. La création d’un écrivaillon aux doigts tachés d’encre. Rien qu’un personnage de fiction.

L’intrigue se laisse lire avec plaisir, cela est non seulement dû à la présence du britannique Holmes et de son compagnon de route, qui joue parfaitement le rôle de l’écrivain tourmenté, l’américain James. Mais aussi par ces parfums de mystère qui entourent des morts suspectes, des complots qui se fomentent, des rivalités impitoyables, des amours obscurs et impossibles, tout cela sur fond de vaudeville bourgeois. Et puis un dénouement ouvert, qui laisse place à une suite éventuelle (mais je viens de m’apercevoir que le roman a été publié en 2015 et qu’a priori il n’y a pas eu de suite), dans un terrible combat que personne ne peut vraiment se vanter d’avoir gagné.

On peut tout de même déplorer quelques longueurs parmi ces six cents pages, l’intrigue tend à s’enliser par moments entre les scènes des différents personnages secondaires du roman. Toujours est-il que j’ai apprécié ce duo impossible et que j’ai très envie de me plonger dans l’œuvre d’Henri James, que notre auteur américain a eu à cœur, et il a d’ailleurs vraiment réussi, à mettre au centre de l’histoire ainsi que les différents titres de romans, nouvelles et pièces de théâtre qu’il a à son actif. Même si l’homme en lui-même parait un peu sinistre, à mon goût, enveloppé d’une tristesse infinie, par le manque de récompense de ses efforts, par ses proches qui ne cessent de disparaître les uns après les autres, l’auteur qu’il était, aujourd’hui reconnu, est dépeint comme un artiste plein de talent et très prolifique. L’auteur a su aborder le petit monde littéraire américain de cette fin de siècle d’une modernité qui s’annonce autour de James avec Mark Twain et d’autres. Il y instille même les critiques émises sur son œuvre, par le biais de cette petite société américaine aisée, accumulant reproches et compliments.

C’est un roman policier assez ingénieux, malgré sa longueur, qui joue constamment avec les limites de la fiction de la réalité. L’auteur s’éloigne un peu des codes habituels du polar et a pris le risque de reprendre une figure littéraire déjà archi-connue et de mettre en fiction l’un des plus grands auteurs américains. L’idée est originale, plaisante, et aboutie.

« Ce que je veux dire, poursuivit Holmes, c’est que si je n’ai pas eu le plaisir de lire vos romans ou vos nouvelles, monsieur James, nombre de mes connaissances plus portées sur la littérature l’ont eu, dont Watson lui-même. Et d’après ce qu’ils me racontent, le récit que vous feriez de nos aventures les plus haletantes en Amérique aurait pour personnage principal une belle jeune femme, entourée de quelques lords et ladies, des dialogues obscurs y succéderaient à de vagues descriptions, et il ne s’y passerait rien de plus excitant qu’un faux pas verbal ou un retard pour le thé. »

James se demanda s’il devait se sentir offensé – et le montrer -, puis décida qu’il ne l’était pas. Somme toute, il était amusé.

« Dans ce cas, je ne vois pas quel besoin vous pourriez avoir de ma présence pour cette balade chimérique que vous semblez sur le point d’entreprendre.

– Ah, mais si, monsieur James. J’ai besoin de vous pour m’ouvrir des portes, me fournir des informations, éclairer pour moi le contexte américain, garantir – comment dire ? – ma couverture et me tenir compagnie. Voulez-vous en savoir davantage sur les raisons de tout cela? »

Pour en savoir plus

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,Au début, face à ce groupe d’espions amateurs, Joe pense à une grande mascarade innocente. Cependant, quand l’écrivain et lui voient un sous-marin allemand à côté d’un yacht de luxe, la situation se corse… Les événements se précipitant, l’agent Lucas, en plein mélodrame et sans piste, devra rapidement reprendre ses esprits s’il veut démêler les nœuds de cette intrigue !

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