Summit

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Au Groenland, les plus grands flics scandinaves se sont réunis. Le chef de la police locale, Qaanaaq Adriensen, est chargé de les conduire dans le désert glacé de l’inlandsis pour un trek qui doit éprouver leur solidarité. Mais un flic disparaît bientôt, un autre est pris pour cible… Le grand continent blanc se referme sur eux comme un piège.

Mo Malø

389 p.

Editions Points

Ma Note

⭐⭐⭐⭐

Note : 3.5 sur 5.

Bien souvent, l’abandon du verbe était un signe annonciateur du renoncement. Lorsque l’humain admettait qu’il n’était plus humain, mais rien de plus qu’un paquet de chairs parmi d’autres.

Mo Malø, je l’avais en plusieurs exemplaires chez moi, me disant de temps à autre qu’il faudrait que je le lise : c’est chose faite avec ce livre, paru chez les Editions Points, gagné à un concours. Summit est le quatrième titre de cette série qui se déroule au Groenland et intitulée Qaanaaq Adriensen du nom de son héros principal. Je suis assez friande de polars nordiques, j’étais donc assez certaine que ce roman me plairait. Je n’ai pas lu les titres précédents, et pour autant, ma lecture n’a pas été gâchée par des éléments éventuels qui manqueraient, quelques notes de bas de page pallient les éventuelles interrogations du lecteur. Le titre Summit se réfère à la station de recherche Summit Station ouverte toute l’année près du sommet de l’inlandsis du Groenland, exploitée par la Fondation nationale pour la science des États-Unis.

Un sommet des principaux criminologues rattachés aux forces de police scandinaves, SPA Scandinavian Police Association, est prévu au Groenland, dont notre Danois, Qaanaaq Adriensen, à la tête de la police groenlandaise, à Nuuk, capitale du territoire, qui est rattaché au royaume du Danemark. À ce rassemblement, sont prévus des membres de Sirius, le directeur de la police judiciaire islandaise. Si l’un des participants apparaît manquant, le reste des protagonistes prennent les traîneaux et les chiens pour une excursion en traineau, censée établir, sinon une complicité, une forme d’entente plus étroite entre eux. Les choses vont mal tourner et les premiers morts vont commencer à tomber entre les invités surprise, ceux qui n’auraient pas dû être là, et les individus qui ne sont pas ce qu’ils disent être. Autant dire que les immensités blanches du Pays Vert sont idéales pour instaurer tensions – à côté des assassins, il y a d’abord l’ours polaire qui a la patte leste et les crocs acérés, la motivation de l’attaque aiguisée dès que l’estomac crie famine – et chasses à l’homme dans un espace grand ouvert, qui ne semble avoir ni début ni fin, et des conditions climatiques qui vous transformerait en Reine d’Arendelle dès lors que vous ayez eu le malheur de penser que de deux couches de vêtements seront suffisantes à vous maintenir au chaud.

Mo Malø nous indique en préambule que la plongée dans les univers groenlandais peut – être déroutante pour le lecteur non au fait du territoire et de sa langue, nous avons heureusement une carte et un glossaire pour nous assister. Les péripéties nous font comprendre non seulement la façon dont le territoire est administré et la culture du territoire groenlandais, sa langue (sachez donc que le terme Inuit est le pluriel d’Inuk et dont la forme duelle est Inuuk) et ses croyances. Ce partage entre culture danoise et groenlandaise, constituée entre autres des peuples Inuit, dont le héros porte l’identité et l’histoire déchirée entre son peuple autochtone inuit, sa langue très chuintante, et les Danois qui se sont appropriés ce sol à plusieurs milliers de kilomètres de chez eux. Mais quand il s’agit de querelles de clochers, finalement, les choses sont partout pareil, et c’est à travers ce qui paraît être d’offensives inimitiés entre policiers du même bourg que les embrouilles se matérialisent. 

Tout le contraire d’un huis clôt ici, pourtant les dissensions sont les mêmes, entre jeux d’égos démesurés des responsables, de mensonges divers, de petites et grandes duperies, en premier lieu par ceux qui ne sont pas ce qu’ils ont l’air d’être, ou qu’ils le dissimulent bien : l’intrigue est efficace et bien servie par un contexte passionnant et mal connu, et qui nous permet de toucher du doigt la culture inuk. En premier lieu. Le tout entouré des problématiques infranationales de clans de motards légèrement fanatisés, rapts, drogue et rock’n roll, et une histoire personnelle, celle de notre héros mi-inuk mi- danois, dont la narration lève un pan de voile. Et qui n’a pas fini de nous intriguer.

Voilà que comme Massaq ou Emet avant lui, Apputiku le confrontait à ses dilemmes. La violence de son ton pétrifia tout le groupe, Bornberg compris.

– Tu veux devenir un véritable Inuk, un Groenlandais qui respecte le pacte de notre peuple avec Nuna, ou tu préfères rester une saleté de colon ?

Le danois d’Appu, volontiers approximatif, avait cette fois jailli, aussi affûté qu’un harpon.

Aussitôt sa pique lancée, il fonça vers la porte sans demander son reste. Lui que tous considéraient comme un concentré de jovialité bouillait d’une colère inconnue. Face empourprée. Poings contractés. Le vantail en bois coloré claqua derrière lui.

Evoquer le grand Nord, c’est inévitablement lire des observations sur le réchauffement climatique, la fonte de la calotte glaciaire, l’errance des ours affamés. Summit est le dernier tome ce qui est pour l’instant une tétralogie, mais la fin laisse présager, exige même, une suite éventuelle. L’auteur français m’a fait passer un moment palpitant, hors du temps, hors de mes repères habituels au Groenland, et m’a donné une première ouverture sur la culture inuk, que j’ai très envie d’approfondir. 

Ils n’étaient partis que depuis quelques minutes lorsqu’un voile blanc s’ajouta aux ténèbres, brouillant un peu leur perception. Dans le faisceau du phare avant, des flocons lourds voletaient, de plus en plus gros, de plus en plus denses, plaqués sur le sol par des rafales déchaînées. Du blizzard. Encore et toujours. Réfugiés dans le confort relatif de la base, ils en avaient oublié les rigueurs de l’inlandsis.

Le souffle mugissait de toutes ses forces face à eux. Mur de vent et de glace.

– Je les vois, ils sont là ! hurla le Sami.

A une cinquantaine de mètres environ, sur leur gauche, l’équipage qu’ils pourchassaient gisait sur le flanc. Un hummock sournois avait eu raison de la motoneige échouée comme un animal blessé, son moteur hoquetant par saccades. Jacobsen, reconnaissable à sa parka rouge, reposait non loin, sur le dos. Gémissant et inerte.

Mais leur regard fut happé par une autre silhouette, celle de Qaanaaq. Debout devant son patron livré à sa merci. Une sorte de barre métallique entre ses mains.

Un tuut !

Les titres précédents de Mo Malø chez Les Editions Points

Adopté à l’âge de trois ans, Qaanaaq Adriensen n’a jamais remis les pieds sur sa terre natale, le Groenland. C’est à contrecœur que l’inspecteur accepte d’aider la police locale, démunie devant ce qui s’annonce comme la plus grande affaire criminelle du pays : quatre ouvriers de plateformes pétrolières retrouvés le corps déchiqueté. Les blessures semblent caractéristiques d’une attaque d’ours polaire. Mais les ours crochètent-ils les portes ? Flanqué de l’inspecteur Apputiku, Qaanaaq va mener l’enquête. Et peut-être remonter ainsi jusqu’au secret de ses origines.

Depuis sept mois qu’il a été nommé chef de la police locale au Groenland, l’inspecteur danois Qaanaaq Adriensen a fini par s’habituer aux rudesses du climat de la grande île blanche. La découverte, au beau milieu de la baie touristique de Diskø, d’un homme assassiné d’une atroce façon, et dont le corps est figé dans la glace d’un iceberg, marque le début d’une enquête qui va fortement l’ébranler.